Place de la République
Place de la République

Quilhan.com

 

 

La place de la République, c’est notre place de l’Étoile à nous, gens de Quillan.

 

D’après Vincent Albas

En effet, c’est de là que partent, si nous prenons le sens inverse des aiguilles d’une montre: la rue de la Rhode et le quai du Pouzadou (en empruntant le Pont Vieux ) puis, la Grand’Rue Vaysse Barthélémy jusqu’au rond point Docteur Marx, la rue de la Mairie qui nous amène à la rue de la Paix, la rue de l’Église que j’ai fréquentée quatre fois par jour durant ma scolarité; vient ensuite la rue Anatole France, qui fut un temps rue de l’Ancienne Mairie. C’était jadis une rue très passante, souvent déserte aujourd’hui car elle a perdu tous ses commerces, mais qui aboutit toujours au boulevard Jean Bourrel et ouvrait autrefois l’accès vers le foirail où furent construits la poste, le dispensaire et vers la route nationale, les bains douches jugés aujourd’hui inutiles et dont le bâtiment empreint d’un certain cachet abrite l’office du tourisme, enfin vers la gare.

Et voici la rue de la Hille, re-baptisée rue Julien Baudru en 1945.en hommage à un résistant, elle est prolongée par le quai de la Hille jusqu’au pont Suzanne et par la rue Jules Baux jusqu’à la route nationale.
La rue de la Hille, c’est ma rue natale, c’est là, au n° 8, que le 12 septembre 1923, j’ai vu le jour et poussé mes premiers cris. Ce fut ma demeure jusqu’en 1928, date à laquelle mon père déménagea au n° 16 rue de la Rhode car la famille s’était agrandie avec la venue au monde de mon frère Émile (Milou).

Cette place est pour moi remplie de souvenirs. Je revois les bouchers fiers de présenter aux Quillanais la belle viande qu’ils allaient leur vendre durant la semaine.
Une foule se pressait pour voir courir un pauvre animal, tenu au bout d’une longe et qui allait être abattu. La bête se frayait un passage parmi les badauds d’où s’élevaient des cris de joie et de frayeur. C’était une coutume traduite ainsi par un dicton «Si fas pas coure la vaca te croumparen pas le feje» (Si tu ne fais pas courir la vache, on ne t’achètera pas le foie).
Cette pâle corrida terminée, la vache devait passer le Pont Vieux et se diriger vers l’abattoir, il n’était pas facile de la convaincre et nos bouchers avaient fort à faire pour la persuader.

Les mercredis, notre place s’animait avec le marché de bouche. Les produits, qu’on qualifierait de bio aujourd’hui, étaient vendus par les jardiniers de Quillan: Mme Olive de la Rhode, les Bastou (dits Pessérou), Puertas du Pont Neuf, Chassou du Coulant, Barbano de l’île et d’autres encore…

Je n’ai pas parlé des réjouissances à l’occasion des fêtes nationales pour ne pas évoquer la guerre 39-45 et les heures noires de ma jeunesse.

Je ne puis oublier la Halle, c’était un bâtiment métallique, style Pavillon Baltar. Délaissé depuis longtemps, il servit cependant à la préparation de la soupe populaire puis de cuisine à un régiment de soldats belges réfugiés à Quillan après la défaite de 1940. Il fut aussi utilisé par les services municipaux qui y entreposaient divers matériels. À l’intérieur, il n’était pas rare de rencontrer des rats de très belle taille, il faut aussi préciser que le principal égout de Quillan se jetait dans l’Aude, juste au pied de ses fondations.
La façade servait de panneau d’affichage pour diverses publicités: spectacles de la Cigale, réunions publiques et annonces municipales. La Halle fut démolie après la guerre de 39-45 démolition longtemps contestée.
Jouxtant la Halle, se trouvait le Café Pech, devenu par la suite Café Journet. On y accédait par une seule porte coincée entre la Halle et la maison Ormières, une des plus belles de la ville.

Notre place accueillait aussi les foires quasiment mensuelles: foire aux cochons, aux patates, aux comportes, car nous avions à Quillan un tonnelier fabricant de barriques, cuves, cuviers à lessives et comportes. N’oublions pas la foire des vendanges et bien d’autres encore.
Tout autour de la place s’ouvraient les vitrines de plusieurs commerces: la mercerie « Gagne Petit » de la famille Pinard, la pharmacie Rey-Dussert, la quincaillerie Calvet dont je possède une pendule comtoise (marquée Calvet Quillan), la poissonnerie de Mme Fourcade dite « Babelette », l’épicerie de Louis Lauze, un établissement bancaire et la Poste de Quillan.

Les deux statues de la Liberté qui y furent érigées tour à tour avaient déjà été enlevées.

Telle était « place de l’Étoile » à nous Quillanais, sans Arc de Triomphe, toute simple mais si vivante !
Qu’importe les anecdotes que j’ai pu oublier, je ne raconte que les souvenirs d’un Quillanais dont la chance fut de naître, de pouvoir vivre au pays et d’y couler des jours heureux.

Ce texte nous a été communiqué par notre compatriote Vincent Albas.